infmp.fr

Introduction : DPC, entre exigences éthiques et contraintes juridiques

Pour vous, professionnel de santé, le Développement Professionnel Continu (DPC) est un passage obligé, mais connaissez-vous précisément les règles qui l’encadrent ? Deux notions reviennent souvent sans toujours être clairement distinguées : l’obligation déontologique d’une part, et l’obligation réglementaire d’autre part. Si elles convergent vers un même objectif – la qualité des soins – leurs fondements, leurs conséquences et leurs modalités diffèrent nettement.

Distinguer obligation déontologique et obligation réglementaire dans le DPC n’est pas une question de jargon. Cela vous permet d’ajuster votre pratique, de comprendre les risques (et leurs conséquences) mais aussi de valoriser votre engagement. Voyons concrètement ce que recouvrent ces deux notions.

infmp.fr

Qu’est-ce qu’une obligation déontologique ?

Définition et fondement

Une obligation déontologique est une exigence morale et professionnelle, inscrite dans le code de déontologie propre à votre profession (médecins, infirmiers, chirurgiens-dentistes, etc.). Elle découle de l’éthique professionnelle : il s’agit d’honorer la mission de protection et d’amélioration de la santé, dans le respect des bonnes pratiques. C’est dans cette logique que l’article 11 du Code de déontologie médicale précise :

  • Le médecin a le devoir d’entretenir et de perfectionner ses connaissances (source : Code de la santé publique, article R.4127-11 CSP).

Cette exigence s’applique à toutes les professions réglementées du soin, chaque code de déontologie ayant ses propres formulations mais un fond commun.

Conséquences concrètes pour les professionnels de santé

  • Elle relève de la responsabilité individuelle : chaque professionnel doit s’engager personnellement dans une démarche de formation continue.
  • Son non-respect peut entraîner des poursuites ou des sanctions déontologiques (avertissement, blâme, interdiction temporaire d’exercice…), décidées par les instances ordinales (Conseil de l’Ordre).
  • Elle existe indépendamment de la forme que prend la formation continue : séminaires, congrès, formation en ligne, revues scientifiques, etc.

En somme (et sans résumer) : l’obligation déontologique est universelle, permanente, et vise la qualité et la sûreté de vos pratiques.

infmp.fr

Qu’entend-on par obligation réglementaire ?

Définition, cadre légal et évolutions récentes

L’équation change avec l’arrivée du DPC en 2009 (loi HPST) puis son renforcement en 2016 via la loi de modernisation de notre système de santé. L’obligation réglementaire, elle, est inscrite dans la loi :

  • Tout professionnel de santé doit justifier d’un parcours de DPC triennal (Code de la santé publique, article L4021-1 et suivants).
  • L’Agence nationale du DPC (ANDPC) est chargée du contrôle de cette obligation pour les professionnels libéraux et salariés des centres de santé conventionnés.

Plus concrètement :

  • Il existe un cadre juridique précis : 3 ans pour réaliser, chaque période triennale, une action de DPC validée (programme, formation, EPP, gestion des risques…)
  • Des organismes vérifient le respect de cette obligation. L’ANDPC opère pour une partie des professions, les ARS pour les établissements, et les ordres pour le suivi individuel.

Depuis 2019, le contrôle s’intensifie : lors du renouvellement d’inscription au tableau de l’Ordre, il peut être demandé de justifier de votre engagement dans un parcours de DPC. Certains ordres (médecins, chirurgiens-dentistes, sage-femmes) optent pour un contrôle systématique ou au moins aléatoire chaque cycle.

Conséquences vis-à-vis du non-respect

  • Risques réglementaires : rappel de l’obligation, voire sanctions ordinales pour défaut d’accomplissement du DPC.
  • Pour les secteurs salariés ou hospitaliers : budget formation bloqué, avertissement, inscription dans le dossier professionnel, voire impact sur l’avancement (dans certains établissements).
  • En libéral : refus de certaines aides conventionnelles (certains types de ROSP), entrave à l’installation ou au maintien sur certaines listes d’aptitude.

Le non-respect de l’obligation réglementaire est donc davantage susceptible d’entraîner des conséquences formelles, et fait désormais l’objet de contrôles effectifs.

infmp.fr

Comparaison : ce que cela change concrètement

Obligation déontologique Obligation réglementaire
Basée sur le code déontologique Basée sur la législation (CSP, lois de santé)
Statut individuel, permanent, moral Statut légal, périodique (tous les 3 ans), officiel
Sanctions ordinales, surtout éthiques Sanctions juridiques, impact administratif
Formes de formation élargies (lecture, congrès…) DPC uniquement (actions enregistrées à l’ANDPC ou DPC hôpital)
Contrôle par l’Ordre Contrôle par l’ANDPC, ARS, employeur, Ordre

Voici, de façon synthétique, comment ces obligations se distinguent et s’articulent. Le professionnel doit se former en continu (déontologie), mais il doit aussi prouver qu’il l’a fait selon les modalités définies par la réglementation actuelle.

infmp.fr

Des exemples concrets pour mieux distinguer

1. Cas d’un médecin libéral

  • Il suit régulièrement des congrès et lit des revues – il respecte l’obligation déontologique.
  • Mais il n’a pas validé de parcours DPC pendant 3 ans : il n’est pas en règle vis-à-vis de l’obligation réglementaire, même s’il peut prouver son investissement personnel.

2. Cas d’une infirmière salariée

  • Son établissement lui propose uniquement des formations internes non référencées DPC. Elle y participe avec assiduité – c’est compatible avec la déontologie (elle se forme).
  • Mais si aucune action n’est reconnue comme DPC par le système officiel, cela peut poser problème lors d’un audit réglementaire.

3. Contrôle ordinal

  • Lors d’un renouvellement au tableau de l’Ordre, on peut demander la preuve de validation DPC du dernier cycle.
  • Faute de justificatif, le praticien risque une sanction sur le plan déontologique (manquement à l’obligation de formation), et sur le plan administratif selon le contexte (non-conformité DPC).

Un chiffre illustratif

Selon un rapport de l’Agence nationale du DPC, 45 % seulement des médecins libéraux ont complètement validé leur obligation réglementaire DPC sur la période 2019-2022 (source : ANDPC, Bilan 2022). Pourtant, plus de 85 % participent à au moins une action de formation hors-DPC – ce qui montre bien la distinction entre engagement moral et conformité administrative.

infmp.fr

Pourquoi maintenir la double exigence ?

Le système français, comme beaucoup d’autres systèmes de santé européens, maintient ce double registre pour garantir deux choses :

  1. La qualité et l’actualisation permanente de la pratique clinique. Ce qui passe par un renouvellement de l’exigence déontologique, mais aussi l’incitation à explorer de nouveaux savoirs (exemple : nouveaux traitements, recommandations HAS…).
  2. La traçabilité et la transparence vis-à-vis de la société. Le DPC réglementaire permet de prouver, par des justificatifs concrets, un engagement réel et contrôlé. Ceci vise à lutter contre les dérives et à renforcer la confiance de la population dans le système de santé.

Cette approche se retrouve aussi à l’international : au Royaume-Uni, la GMC (General Medical Council) renforce chaque année le contrôle des actions de développement professionnel (revalidation); au Canada, le Collège des médecins exige un nombre minimal d’heures et une déclaration annuelle.

infmp.fr

Les points-clés à retenir pour votre pratique

  • L’obligation déontologique ne disparaît pas avec la mise en place du DPC : elle est le socle moral de votre engagement.
  • L’obligation réglementaire DPC est périodique, traçable et justifiable : il faut pouvoir prouver votre participation à des actions reconnues DPC.
  • Les contrôles, longtemps rares, sont désormais réguliers et systématisés dans certains départements et spécialités.
  • Dans la majorité des cas, vous êtes amené à justifier des deux volets (éthique et légal).
  • L’inscription à une formation non-DPC (congrès, séminaire hors cadre, auto-formation) reste précieuse, mais ne suffit pas à répondre à la réglementation actuelle.
infmp.fr

Pour aller plus loin : textes de référence utiles

infmp.fr

Perspectives : valoriser votre DPC dans ce double cadre

Distinguer clairement obligation déontologique et obligation réglementaire vous aide à mieux piloter votre formation et à communiquer sur la qualité de votre implication professionnelle. Comprendre cette dualité n’est pas une simple formalité administrative : c’est un levier pour mieux choisir vos parcours, pour anticiper les contrôles, et pour inscrire votre engagement dans cette dynamique d’amélioration continue si précieuse à la profession et à la société. Et si la règlementation n’accompagne pas toujours parfaitement l’évolution des sciences, se tenir informé des deux volets reste la posture la plus sûre.

Vous avez une question, un cas particulier, ou souhaitez un éclairage sur votre parcours ? Laissez un commentaire ci-dessous ou consultez les guides pratiques disponibles dans la rubrique ressources utiles du blog.

Pour aller plus loin