Face à la prévalence croissante des pathologies chroniques en France (plus de 20 millions de personnes concernées selon l’Assurance Maladie[1]), la formation continue des professionnels de santé, structurée via le Développement Professionnel Continu (DPC), se présente comme un levier incontournable d’amélioration des soins.
Le DPC, obligatoire pour tous les professionnels de santé (loi HPST 2009, ordonnance de juillet 2021), vise à garantir l’actualisation des connaissances, l’évaluation des pratiques professionnelles et l’acquisition de compétences pluridisciplinaires. Mais quels impacts concrets observe-t-on pour les patients souffrant de maladies chroniques ?
Selon le rapport annuel de l’ANDPC (2023)[2], près de 65% des formations validées par les médecins généralistes en 2022 concernaient des thématiques liées à la prise en charge des pathologies chroniques ou aux soins coordonnés. Cette dynamique se retrouve également chez les paramédicaux, avec une forte participation aux programmes ETP et de coordination interprofessionnelle.
Indicateur | Avant généralisation DPC | Après intégration DPC | Sources |
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Fréquence de l’éducation thérapeutique chez les patients diabétiques (en soins primaires) | 15% | 38% | CNAM, 2019-2023 |
Taux d’initiation des traitements de fond chez les patients BPCO | 48% | 61% | GPIP, 2022 |
Nombre d’erreurs médicamenteuses déclarées (patients pluripathologiques) | 5,2/1000 patients/an | 3,3/1000 patients/an | HAS, 2021 |
Ces progrès témoignent d’une appropriation directe des acquis de la formation dans la pratique quotidienne. Une enquête menée auprès de 450 médecins par l’URPS Médecins Île-de-France (2021) révèle que 79% des participants à un programme DPC en maladies chroniques ont modifié ou renforcé leurs protocoles de suivi patient.
Chez les patients atteints de pathologies chroniques, la multiplication des intervenants et la complexité du parcours de soins exposent à un risque de rupture de suivi ou de "perte d’information". Les formations DPC favorisent la maîtrise des outils de coordination (protocoles pluriprofessionnels, dossiers communiquants) et la connaissance partagée des actes et recommandations.
L’Education Thérapeutique du Patient (ETP), pourtant inscrite dans la loi depuis 2009, restait insuffisamment proposée dans les maladies chroniques. Or le DPC a permis une montée en compétences sur les méthodes ETP et sur l’intégration de l’approche centrée patient.
La gestion des prescriptions complexes, l’accompagnement des personnes polypathologiques ou âgées, posent des défis réels en termes de sécurité. Les sessions DPC axées sur la maîtrise des règles de bon usage du médicament, les interactions et la déprescription ont un impact direct.
Loin de n’être qu’un effet indirect, l’évolution des postures relationnelles est l’un des bénéfices les plus qualitatifs rapportés par les patients chroniques. Après un parcours DPC :
Cela se traduit par une plus grande autonomie dans l’adaptation des traitements (ex : ajustement des doses d’insuline, auto-surveillance de l’asthme, stratégies d’auto-soin dans l’insuffisance cardiaque).
Un des principaux freins à la prise en charge optimale des patients chroniques réside dans l’obsolescence rapide des recommandations de bonne pratique. Le DPC offre un accès structuré aux mises à jour (HAS, sociétés savantes, recommandations internationales). Il permet aussi de décliner ces recommandations à l’échelle du territoire et de la patientèle – ce qui améliore l’équité de prise en charge.
Le développement exponentiel des maladies chroniques, la complexification des innovations (télémédecine, dispositifs connectés, thérapies ciblées), tout cela impose une actualisation continue des compétences.
Le DPC, loin d’être un simple impératif administratif, s’impose dans la pratique comme un moteur volontaire d’amélioration de la qualité, dans une dynamique qui profite au premier chef aux patients en situation de chronicité et à leurs familles. Sa valeur tangible repose autant sur des indicateurs objectivables que sur la transformation qualitative de la relation soignant-soigné, l’autonomisation et la sécurité du patient.